Michael Wesely: Stilleben | Galerie Esther Woerdehoff | Paris

Lisbeth Thalberg
Michael Wesely, B7944 Stilleben (17.4 - 24.4.2020), 2020 Série Stilleben, tirage pigmentaire Pièce unique
©Michael Wesely, courtesy Galerie Esther Woerdehoff

La photographie peut-elle mesurer l’épaisseur du temps ? C’est la question que posent les oeuvres du photographe allemand Michael Wesely présentées dans l’exposition Stilleben.

Michael Wesely conçoit des images photographiques en pièces uniques qui résultent de la superposition de milliers, voire de millions, d’images individuelles capturées sur un temps d’exposition long.

Nous pouvons ainsi voir en une photographie tout ce qui se trouvait devant l’objectif pendant un temps donné. Si la démarche de Michael Wesely a des accointances avec la vidéo, qui partage avec elle cet enregistrement du réel, elle saisit cependant l’essence d’un phénomène, l’idée même d’une chose.

La vie d’un bouquet de fleurs, de sa naissance à son flétrissement, la lueur vacillante des bougies qui veillent sur les morts dans un cimétière mexicain et la course du soleil sur la façade du Museum of Modern Art tout au long de sa rénovation, se retrouvent ainsi condensées dans ces images-mondes.

Michael Wesely: Stilleben | Galerie Esther Woerdehoff | Paris
Michael Wesely, B1520 The Museum of Modern Art, New York (2.5.2003 – 21.11.2004), 2004, tirage pigmentaire
©Michael Wesely, courtesy Galerie Esther Woerdehoff

Le découpage du temps s’en trouve complètement déstabilisé car la durée d’exposition pour créer ces synthèses visuelles peut se compter en semaines, en mois ou en années. L’image fixe obtenue ne permet pas de le dire.

Du point de vue de la composition, un autre renversement s’opère. Les éléments mobiles vont laisser une empreinte moins forte que les éléments fixes, ce qui donne lieu à des images qui semblent frémir, comme si elles étaient animées d’une mécanique intérieure.

Michael Wesely
Michael Wesely, B8761 Stilleben (13.4. – 17.4.2021), 2021 Série Stilleben, tirage pigmentaire
©Michael Wesely, courtesy Galerie Esther Woerdehoff

Les oeuvres de Michael Wesely sont des images vivantes qui nous montrent l’écoulement du temps. Elles ont le pouvoir de nous extraire de l’image fixe, propre au médium photographique, pour nous faire entrer dans la vie du sujet photographié qui devient alors palpable. La démarche artistique de Michael Wesely renoue avec la dimension mémorielle qui prévalait dans les premiers temps de la photographie. Ces images sont des supports de remémoration de la vie des choses.

Avec Stilleben, la galerie expose pour la première fois le travail de Michael Wesely, qui a récemment intégré son programme.

Michael Wesely

La photographie nous renvoie au passé. L’artiste allemand Michael Wesely, né en 1963 à Munich, s’intéresse à cet espace inexistant où le futur devient le passé.

Dans la théorie de la relativité d’Albert Einstein, le présent n’existe pas en tant que valeur physique ; là où nous croyons percevoir le maintenant, il s’est déjà éloigné. Michael Wesely crée de véritables archives du temps sur des jours, des semaines, des années, alors que la photographie est un art rapide, la capture d’une seule image ne prenant généralement qu’une fraction de seconde. Dans un laps de temps bien défini, soumis aux cycles de la terre, des marées, du soleil et de la lune, il crée une seule photographie.

Depuis 1988, il conçoit des images avec des temps de pose allant jusqu’à trois ans, exposées sur une seule pellicule, à l’aide d’appareils photographiques et d’objectifs grand format qu’il fabrique lui-même.

Depuis 2012, les longues poses numériques donnent naissance à des milliers, voire des millions d’images individuelles qui, contrairement à un appareil argentique, ne sont pas placées les unes derrière les autres, mais les unes au-dessus des autres. Il en résulte, comme pour les photographies analogiques, une image unique qui ne se révèle au spectateur que progressivement.

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