Cyrielle Gulacsy : Lumière terrestre | Exposition personnelle du 4 novembre au 16 décembre 2023 | Galerie Anne-Sarah Bénichou | Paris

VL-R 02, 2023, acrylique sur toile, 180 x 150 cm,
courtesy de l’artiste et de la Galerie Anne-Sarah Bénichou.
Lisbeth Thalberg Lisbeth Thalberg

Pour sa première exposition personnelle à Paris, Cyrielle Gulacsy présente un ensemble d’oeuvres nouvelles de média variés : peinture, dessin, photographie et sculpture. Faisant le contre-pied de sa précédente exposition à New York “Light in the Distance” qui nous menait jusqu’aux lueurs les plus lointaines du cosmos, l’exposition “Lumière terrestre” propose un retour sur Terre. Un atterrissage guidé non plus par les étoiles, mais par le vivant : l’une des sources de lumière les plus puissantes que l’univers ait engendré.

Ces nouvelles oeuvres sont inspirées des travaux de l’astrophysicien David Elbaz, décrits dans le livre La plus belle ruse de la lumière.

Cyrielle Gulacsy
Terrestrial Light 01, 2023, tirage photo cyanotype sur papier, 53 x 39 cm,
courtesy de l’artiste et de la Galerie Anne-Sarah Bénichou.

Texte de l’exposition écrit par David Elbaz
Astrophysicien
Directeur Scientifique du Département d’Astrophysique – CEA Saclay
Rédacteur en chef de la revue Astronomy & Astrophysics

Regardez autour de vous, la forme des arbres, des feuilles, des fleurs incarne un principe universel qui imprègne l’univers aussi loin que porte le regard. Au commencement, il n’y avait rien de vivant, et pourtant c’était déjà là. Nos télescopes en témoignent : depuis la nuit des temps, la lumière se multiplie et la matière s’organise. Les formes des premières étoiles et des nébuleuses qui les portent obéissent au même principe que celui qui déploie les pétales d’une fleur : capter la lumière et multiplier ses grains, les photons.

Par hasard ?
Oui, bien sûr, il n’y a pas deux formes semblables,
et c’est grâce au hasard que naît la singularité à l’origine de la beauté.

Un rêve ?
Naturellement. La nuit n’est-elle pas le refuge du rêveur ?
La nuit, l’obscurité, les vides cosmiques et autres nébuleuses sombres cachent bien leur jeu.
Le jeu de la lumière, qui leur donne un sens en dessinant leurs contours, en profitant de leur absence
pour remplir le cosmos.

Et nous ?
Des êtres de lumière ?
Et pourquoi pas.
Mais aussi l’escargot, le trèfle, le chêne. Et la Terre… Et le Soleil…

Tous les êtres vivants sont de puissantes sources de lumière infrarouge. Même le plus petit insecte, proportionnellement à sa masse, rivalise avec la puissance lumineuse d’une étoile. On se rend compte que l’abeille se distingue de l’étoile non pas par ses ailes ou son dard – même s’il faut econnaître que l’étoile n’a ni l’un ni l’autre – mais parce que la matière qui forme le corps de l’abeille rayonne des milliers de fois plus de photons que celle qui habite l’étoile.

Le temps égrène les grains de lumière et le monde se transforme.

Comment capturer l’essence de ce mouvement, de ces transformations invisibles et paradoxalement lumineuses ? C’est peut-être ce qui unit et réunit les oeuvres de Cyrielle Gulacsy.
Elles naissent d’une même intention… Voir l’invisible.
C’est de là que nous venons. Là où les particules de lumière sont les plus nombreuses, car la lumière existe même quand nos yeux ne la détectent pas. Heureusement, sinon nous serions éblouis par notre propre lumière… Avec elles, nous pouvons voir l’invisible, percevoir l’universel dans la singularité des formes vivantes et terrestres, reconnaître nos origines cosmiques, malgré nos singularités, retrouver le confort de se sentir enfin chez soi, au milieu des étoiles et des trèfles.

Lorsque nous regardons une oeuvre de Gulacsy, la magie opère, nous réconciliant avec l’invisible, révélant l’universalité de notre singularité. Nos racines plongent dans les confins de la Terre jusqu’au coeur de l’univers. Peut-être parce que ce qui nous relie à l’oeuvre, c’est notre fragilité, les fissures par lesquelles passe la lumière.

Comment se fait-il que nous l’ayons toujours su sans jamais l’avoir pensé ? Nos yeux ont la capacité de détecter un seul photon. Nous n’en sommes pas vraiment conscients, mais l’expérience a été faite, et le chercheur qui l’a réalisée a lui-même décrit la sensation qu’il a ressentie lorsqu’un photon s’est posé sur sa rétine : une sorte d’intuition, une forme d’intimité avec la lumière.

La science véhicule une forme de beauté, mais il faut du temps et de la persévérance pour en percer l’épaisse carapace qui sépare l’initié du profane. La finesse et la précision des oeuvres de Cyrielle Gulacsy ouvrent de petites fenêtres qui permettent de voir à l’intérieur, de savourer la beauté des
infinis, des contraires, à la frontière entre l’inerte et le vivant, autant d’expressions de cette lumière invisible inaccessible qui remonte aux origines du monde.

Elles sont une invitation à une forme d’intimité avec la lumière, avec la lumière terrestre…

Cyrielle Gulacsy
VL-R 01, 2023, acrylique sur toile, 180 x 150 cm, courtesy de l’artiste et de la Galerie Anne-Sarah Bénichou.

Cyrielle Gulacsy est née en région parisienne en 1994. Elle vit et travaille à Paris. Son travail évolue sous l’influence des sciences modernes, vers la représentation d’un réel imperceptible de l’ordre de l’abstraction, recelant les lois invisibles de la nature. L’espace-temps, l’électromagnétisme ou encore la diffraction de la lumière sont autant de champs de recherches et d’expérimentations qui lui permettent d’explorer de nouvelles représentations de la réalité́. Dans son travail, elle explore notre perception de la lumière à travers l’espace et le temps et nous dévoile la matière qui la compose. Chaque point, qu’il soit la mesure d’une particule ou d’un objet céleste, donne corps à une réalité́ inaccessible et offre un point de vue à la fois intime et vertigineux du monde qui nous entoure.

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